Accueil Droit Comprendre le fait du prince dans le droit administratif

Comprendre le fait du prince dans le droit administratif

Comprendre le fait du prince dans le droit administratif

Lorsqu'un cocontractant signe un contrat avec l'administration, il s'attend à un déséquilibre de pouvoirs. L'administration possède, en effet, des prérogatives difficiles à égaler. Par exemple, le pouvoir de direction ou de sanction met l'entreprise en position de faiblesse. Néanmoins, le cocontractant a des droits qui lui redonnent certains pouvoirs, notamment lorsque des actions de l'autorité administrative, prises hors contrat, risquent de causer préjudice à son équilibre financier. Si l'autorité administrative prend une décision en exerçant un autre de ses pouvoirs, mais qui peut influer sur l'exécution du contrat en la rendant plus difficile et onéreuse, le cocontractant peut évoquer le fait du prince et avoir droit à être indemnisé.

Quelle est la différence entre l'imprévision et le fait du prince ?

La théorie du fait du prince s'applique lorsqu'il y a préjudice envers l'entreprise qui effectue des travaux pour l'administration. Les conditions sont assez strictes.

  • Le préjudice doit résulter de mesures prises par l'administration rendant le marché plus difficile à exécuter et plus onéreux.
  • Il doit y avoir une imprévisibilité du préjudice au moment de la signature de la convention.

Un autre cas concerne la théorie de l'imprévision en droit administratif. Dans ce cas, il y a déséquilibre lorsque des changements de circonstances, qui n'étaient pas prévisibles lors de sa conclusion, affectent le contrat. L'imprévision n'est possible que sous certaines conditions.

  • L'extériorité - Le préjudice est causé par un événement extérieur aux deux parties. Il n'est pas causé par une décision de l'autorité publique.
  • L'imprévisibilité de l'incident ayant causé préjudice. Il doit avoir été imprévu au moment de la conclusion de l'accord.
  • L'incident vient bouleverser l'économie du contrat. L'exécution des travaux n'est pas impossible, mais plus chère pour l'exécuteur qui va voir une augmentation de ses coûts de +7 % à +10 %.

À noter qu'en cas d'imprévision, le contrat peut être renégocié par voie d'avenant. Le montant de la somme indemnisée ne représente pas, toutefois, la totalité des coûts. 5 à 10 % restent à la charge de l'exécuteur. En cas de fait du prince, l'indemnisation est intégrale.

La théorie du fait du prince est un concept unique dans le droit administratif

Ce principe est un concept essentiel en droit administratif. Pour le comprendre, il faut bien saisir ce qu'est un contrat administratif. Contrairement au droit civil ou au droit privé, il n'y a pas, ici, vraiment de principe d'égalité entre les partenaires. L'autorité publique est en position de force dans un tel contrat. Elle dispose de nombreuses prérogatives telles que :

  • Le pouvoir de contrôle.
  • Celui de sanction.
  • Le pouvoir de modification unilatérale.
  • Celui de résiliation unilatérale.

En revanche, l'exécuteur n'est pas tout à fait démuni. La jurisprudence administrative lui a reconnu certains droits, dont celui de bénéficier d'un équilibre financier. Un cocontractant peut évoquer le fait du prince pour se faire rembourser le manque à gagner résultant des décisions de l'autorité publique. C'est le tribunal administratif (TA) qui statuera sur l'affaire au cas où une négociation à l'amiable ne suffirait pas.

Quelle est la différence entre l'imprévision et le fait du prince ?

Quelles sont les 3 conditions essentielles pour valider un cas de force majeur ?

Le cas de force majeure réunit trois conditions essentielles pour être validée.

  • L'extériorité du fait ayant causé préjudice. Les parties n'en sont pas la cause.
  • L'incident ne peut être anticipé au moment de la signature du contrat.
  • Il est irrésistible aux moyens dont dispose le titulaire.

Les catastrophes naturelles, telles que les intempéries, les guerres ou les grèves, entrent dans les conditions nécessaires pour invoquer une rupture pour force majeure. Cependant, l'invocation du cas de force majeure n'est pas une décision qui se prend à la légère. Des intempéries s'étant déjà déclarées avec la même intensité dans le même lieu par le passé, ne sont pas considérées comme événements irrésistibles. De la même manière, si une grève est causée par une des parties, ce n'est pas considéré comme un événement extérieur et le cas de force majeure ne s'applique pas.

Quels sont les critères pour caractériser un fait du prince ?

Il y a 3 mécanismes qui permettent à un exécuteur de rétablir l'équilibre de pouvoirs dans certaines conditions face à l'autorité publique.

  • Le fait du prince, qui correspond à une situation dans laquelle il y a altération dans l'exécution d'un contrat à la suite de prise de décision de l'autorité contractante. L'exécuteur peut réclamer une indemnisation de son préjudice pour un rétablissement de l'équilibre financier. Par exemple, une commune qui changerait le sens de circulation dans sa ville va causer un préjudice financier à une compagnie s'occupant de transport public.
  • L'imprévision qui intervient lorsqu'il y a un fait extérieur et non prévisible causant un bouleversement affectant l'exécution du contrat sans l'interrompre définitivement. Ce mécanisme a été créé en 1916, lorsqu'une explosion du prix des matières premières, due à la première guerre mondiale, fit augmenter les coûts de la compagnie générale d'éclairage de Bordeaux, chargée de l'éclairage public.
  • La force majeure intervient lorsque le fonctionnement du service public est à jamais compromis et l'équilibre financier est impossible. L'autorité publique peut alors résilier le contrat.

On peut évoquer le fait du prince lorsque :

  • L'administration elle-même prend une décision affectant l'exécuteur.
  • La décision a été prise par l'administration en exerçant un pouvoir qui se trouve hors de sa qualité de partie au contrat.
  • Les circonstances qui bouleversent l'exécution du contrat sont imprévisibles.
  • La mesure concernée met en cause l'économie du contrat.

Quels sont les critères pour caractériser un fait du prince ?

Quels sont les recours possibles en cas de fait du prince ?

Si une mesure administrative cause une rupture pour force majeure ou fait du prince, on peut exercer un recours auprès de l'autorité publique. Ce dernier peut prendre différentes formes :

  • Le recours gracieux, qui prend la forme d'une lettre recommandée avec AR adressée à l'auteur de la décision en question.
  • Le recours hiérarchique est adressé au supérieur hiérarchique de l'auteur. Par exemple, si la décision a été prise par un préfet, le recours sera adressé au ministre de l'Intérieur.

À noter qu'un recours est obligatoire avant la saisine du TA qui est la prochaine étape dans la résolution du problème. Une résolution à l'amiable est toujours préférable dans les cas pas trop compliqués. Elle fait gagner du temps et financièrement, c'est une méthode qui peut convenir aux entreprises. Avant de décider si un fait du prince peut être invoqué, il faut voir si les conditions requises sont réunies. La théorie du fait du prince est applicable si la décision que l'on juge arbitraire provient de l'administration contractante elle-même. Ensuite, le préjudice doit avoir été imprévisible au moment de la conclusion du contrat. En plus, il faut que la mesure ait été prise hors de ses compétences ayant un lien direct avec le contrat. Si toutes ces conditions sont réunies, le fait du prince à des chances d'être invoqué. Il est important pour toute personne signant un marché avec l'administration de bien saisir les tenants et aboutissants du fait du prince et de la force majeure. La récente pandémie et les confinements ont donné lieu à des situations dans lesquelles le fait du prince a pu être invoqué pour des entreprises travaillant avec différentes administrations publiques. De bonnes connaissances en droit administratif et savoir comment gérer les cas de fait du prince est primordial.

Votre guide vers de nouvelles explorations thématiques :